Plumes volantes et grifonnantes. [Hermione]

Regarder le ciel, c'est comme être face à l'éternité. On est au creux de ces deux choses et pourtant jamais on ne les effleurera. Elles sont inaccessibles pour nous pauvres humains que nous sommes.

J'étais en train de déambuler dans les couloirs de Poudlard depuis un moment. Je ne les connaissais pas encore tous, j'avais même une fâcheuse tendance à me perdre, après tout c'était bien plus grand qu'un terrain de quiddicht ou de rugby... Mais se perdre n'avait pas que des mauvais côtés: je pouvais découvrir de nouveaux trucs et de nouvelles personnes. J'aimais bien faire de nouvelles rencontres. Même si parfois j'en arrivais à haïr le genre humain. Enfin bref je déambulais donc dans les couloirs, en uniforme, avec une allure plutôt débraillée, le sac de cour sur mon épaule jouant distraitement avec un mini ballon. C'était désert je ne savais pas pourquoi et la question ne m'inquiétais pas plus que ça, l'aile que je parcourais m'étais familière et dans le fond c'était un peu rassurant à force de me perdre régulièrement j'allais bien découvrir l'ensemble de ce château. Je m'y sentais bien, si bien que je ne voulais pas le quitter même si je devais aller en cours jusqu'à la fin de mon existence. Apprendre me plaisait en plus... Mon regard se perdit par une fenêtre, dans le ciel, si beau, si bleu si clair. Aujourd'hui était l'un des rares jours de soleil dont nous pouvions profiter depuis très longtemps. J'allais aller dehors, mais chaque chose en son temps. Il me restait un courrier à envoyer. J'avais donc un but à mes déambulations.

A force de marcher j'arrivais enfin à la volière. Cet endroit était plutôt déplaisant pour certains, plutôt apaisants pour d'autres. Moi je l'aimais beaucoup, regarder les volatiles voler, dormir, aller et venir. Les plumes jonchaient le sol ainsi que les fientes mais je m'en fichais et comme c'était ouvert il n'y avait pas trop d'odeur. Donc la seule chose qui pourrait être quelque peu dérangeante ne tenait plus. Je m'adossais à un mur, contemplant tantôt le ciel, tantôt le parc, tantôt les chouettes et les hiboux qui se trouvaient là. C'était comme une grande assemblée qui se tenait là devant moi, j'entendais les hululements et je m'imaginais tous ces êtres parler, deviser et trouver des solutions à leur problème de voisinage. J'aurais voulu pouvoir les comprendre, prendre part à ces échanges qui se déroulaient sous mes yeux rêveurs. Peut-être n'étaient-ce la que des rêves de gamine, mais cela m'étais égal. Personne ne pouvait s'arroger le droit de critiquer mes pensées, elles étaient miennes et c'était le plus important. Mon ballon fusait régulièrement en l'air, tournant sur lui même selon l'effet que mes mains lui donnait. Ces gestes étaient mécaniques, distraits, j'étais habituée à présent. Mais cela m'apaisait et me faisait passer de l'état de survoltée à l'état d'à peu près calme.

Je me demandais ensuite ce que cela pouvait faire d'être un hibou. Cela pouvait être marrant, ou pas. Prendre la place d'un animal, pouvoir se métamorphoser en eux à volonté, vivre comme eux voir le monde tel qu'eux le voyaient, cela me plairait énormément. Je voulais pouvoir vivre un jour cet expérience, les côtoyer était une chose, être dans leur peau en était une autre. Vivre. Voilà la seule chose qui me motivait: vivre le plus de choses possible même si ces choses paraissaient folles ou inconscientes aux yeux des autres. Mes idées allaient et venaient et je voulais pouvoir en mettre le plus possible en pratique avant ma mort. Surtout que de nos jours elle pouvait survenir rapidement. Avais-je peur de la mort? Non. Mourir était le terme de nos vies, c'était immuable. J'allais un jour mourir, jeune ou vieille cela m'étais égal, la seule chose que je souhaitais c'était ne rien regretter et surtout ne pas me dire que j'aurais pu faire plus de choses. Alors je m'appliquais à mettre tout cela en œuvre. Apprendre, vivre, bouger, découvrir, tant de mots qui régissaient ma vie pour tenter de la rendre plus belle, et moins misérable. Je posais mon regard sur les oiseaux puis ma chouette se décida enfin à me rejoindre. J'attrapais mon encrier et une plume dans mon sac pour écrire l'adresse sur l'enveloppe et rajouter quelques mots sur la lettre déjà écrite. C'était une lettre pour mes parents, contenant des banalités, je me doutais que le courrier était surement contrôlé donc... Je ne voulais pas non plus qu'on empiète trop sur ma vie privée.

Je pliais à présent la feuille rangeant mon encrier et ma plume pour enfin mettre la lettre dans l'enveloppe et la sceller. Puis je l'attachais à la patte de Thyste et la caressais un moment jouant avec ses plumes sans pour autant les abimer. Elle était d'une patience rare avec moi, elle supportait tout. Puis je lui souhaitais un bon voyage, quiconque m'aurait vu m'aurait surement pris pour une folle, et elle s'envola me laissant de nouveau seule. Ou pas. Je me tournais vers les oiseaux, pour contempler de nouveau leur assemblée que seuls eux pouvaient comprendre, jouant de nouveau avec mon mini ballon par habitude. Pendant un moment c'était un osselet qui ne quittait pas mes mains: tourbillonnant toujours entre mes doigts, puis j'ai décidé d'arrêter de faire dans le sordide et de faire dans le plus joyeux et plus collectif. Parce que par les temps qui couraient c'était de l'espoir que je voulais communiquer aux gens mon espoir, ma pêche et toutes mes envies de mouvement et de soleil. Ce n'était pas facile certes, mais je ne me démontais pas. Un peu égarée dans mes pensées je ne me posais même pas la question de savoir si j'étais toujours seule...